Architecte : Baukunst (Adrien Verschuere) Rédigé par Pierre CHABARD Publié le 11/12/2015 |
Opération minuscule en cœur d’îlot, menée avec un budget serré, ce jardin et cette halle publics dans la commune bruxelloise défavorisée de Molenbeek illustrent tout à la fois les rudes contraintes et la grande vitalité de l’architecture contemporaine belge
L’architecte
bruxellois Adrien Verschuere, formé à l’Institut Saint-Luc Tournai puis à l’EPFL
(où il fut notamment l’élève de Elia Zenghelis), passé par l’agence Herzog
& de Meuron avant de fonder Baukunst en 2008, est chargé du
projet en 2009, suite à un concours sur invitation. Accessible depuis
la rue des Quatre-Vents, ce jardin de poche a un tracé résiduel, résultat
de l’addition de deux bouts de parcelles mitoyennes en quinconce,
l’une sur rue, l’autre à l’arrière d’un immeuble de logements sociaux.
Ce terrain irrégulier, Baukunst choisit de l’occuper avec une forme
simple, stable et régulière : une grande dalle à caissons en béton de 18,5
mètres de côté, portée non pas aux angles mais au milieu de ses côtés
par quatre hautes piles, et couvrant, entre les deux mitoyens, la majeure
partie du fond du jardin. Lorsqu’on l’observe de plus près, cet objet architectural
à l’apparence intransigeante et à l’esthétique miesienne se fait plus ambigu,
recelant finesse d’écriture, empathie aux usages et intelligence urbaine. L’objet
joue d’oppositions : entre la massivité brute de la dalle de béton et la
finesse des piliers qui semblent moins la porter que la retenir ; entre
la stabilité immobile de son plan carré et le mystère vertigineux de
ses porte-à -faux. Son ordre systématique, son homogénéité structurelle, sa
froideur mathématique (deux séries de 14 poutres découpant 169 caissons
identiques) sont également contredits par trois percements aléatoires
(d’un ou plusieurs caissons) qui ouvrent ici une lumière, laissent lÃ
s’épanouir trois arbres existants et qui inscrivent
finalement, dans la forme architecturale, une autre histoire : la vie
de ce jardin, dont Bjorn Gielen, de l’agence Landinzicht, associée à Baukunst,
a conservé certains éléments structurants, quelques grands arbres et la belle
allée pavée qui s’y insinue comme kiev.natashaescort.com un méandre.
BALDAQUIN
Cet
« objet » architectural, très prégnant mais qui se définit avant tout par
l’espace qu’il couvre, se laisse difficilement dénommer : ni un préau
(même si l’école élémentaire voisine l’utilise à certaines heures), ni un
portique (malgré ses quatre piles colossales), ni un pavillon (on ne peut
pas en faire le tour), ni une halle (une dénomination bien trop
générique). À une autre échelle, on parlerait peut-être d’un baldaquin, tant
cette architecture définit avant tout un « ciel ». Flottant avec autorité
au-dessus du jardin, et lui conférant son caractère public, la
structure rend possible de multiples usages (jouer, se réunir pour débattre
ou écouter un concert, s’abriter en attendant la sortie de l’école, etc.)
sans jamais les prédéterminer. Enfin, ce ciel de béton n’est que le
rouage architectural, le plus visible sans doute, de la réflexion
urbaine et programmatique plus ample de Baukunst, qui procède d’une
remise en question du cahier des charges du concours, inscrit dans le contrat
de quartier « Écluse/Saint-Lazare » (2008-2012)1. Plutôt que de construire
le « pavillon passif » demandé, pour abriter « l’antenne de quartier
», l’architecte propose en effet de trouver ces locaux dans le réagencement
de l’aile mitoyenne de l’école dont il ouvre le mur aveugle sur le jardin. En
échange, la nouvelle halle, ainsi vidée de son contenu, devient
potentiellement disponible à d’autres usages, y compris scolaires (un
simple portail existant la sépare de la cour de récréation). Le travail de Baukunst
démontre ainsi brillamment que l’engagement de l’architecte sur le terrain de
la spatial agency (programmation, négociation, stratégie urbaine, etc.)
est tout à fait compatible avec une réflexion pointue et autonome sur
la forme architecturale, dans ses dimensions à la fois conceptuelle et constructive,
abstraite et matérielle.
1. Les «
contrats de quartiers » sont des cofinancements fédéraux, régionaux et
communaux pour des projets de rénovation urbaine conjuguant habitat,
espace public, environnement et action socioéconomique. Quatre-vingt contrats
ont été mis en oeuvre dans la métropole bruxelloise depuis 1994 (cf. www.wijken.irisnet.be/fr/ contrats-de-quartiers-durables).
MAÎTRE D’OUVRAGE : COMMUNE DE MOLENBEEK-SAINT-JEAN (BELGIQUE)
MAÎTRES D’OEUVRE : BAUKUNST (ARCHITECTURE), LANDINZICHT-BJORN GIELEN (PAYSAGE), UTIL (STRUCTURE)
ENTREPRISE : OPENAIR
PROGRAMME : HALLE ET JARDIN – SURFACES : 340 M2 (HALLE), 1250 M2 (JARDIN)
COÛT : ENVIRON 480 000 EUROS HT
LIVRAISON : 2014
Maîtres d’œuvre : FMAU, mission complète ; responsable projet, Frédéric Martinet&… [...] |
Maître d’ouvrage : NFU, ADIM Nouvelle AquitaineMaîtres d’œuvre : NP2F architectes… [...] |
Maître d’ouvrage : ministère de la Culture Maîtres d’œuvre : NP2F architectes… [...] |
Maître d’ouvrage : Mairie de Paris SLA 20Maître d’œuvre : L’Atelier Senzu (arch… [...] |
Réagissez à l’article en remplissant le champ ci-dessous :
Vous n'êtes pas identifié. | |||
SE CONNECTER | S'INSCRIRE |
> Questions pro |
Quelle importance accorder au programme ? [suite]
C’est avec deux architectes aux pratiques forts différentes, Laurent Beaudouin et Marie-José Barthélémy, que nous poursuivons notre enquête sur… |
Quelle importance accorder au programme ?
Avant tout projet, la programmation architecturale décrit son contenu afin que maître d’ouvrage et maître d’œuvre en cernent le sens et les en… |
L’architecture au prisme des contraintes environnementales : le regard singulier de Gilles Perraud…
Si les questions environnementales sont de plus en plus prégnantes, les labels et les normes propres à l’univers de la construction garantissent… |