Face à son obsolescence, trois scénarios pour l’architecture

Rédigé par Maryse QUINTON
Publié le 17/12/2024

Dossier réalisé par Maryse QUINTON
Dossier publié dans le d'A n°322 Par Mathias Rollot


Dans l’ouvrage stimulant qu’il vient de publier, Décoloniser l’architecture, Mathias Rollot prend une position critique très militante envers une société qu’il voit sous l’emprise d’un ultralibéralisme destructeur, raciste et qu’il faudrait décoloniser. Face au risque d’obsolescence de la discipline et au défi de bâtir encore ou pas dans le contexte environnemental d’aujourd’hui, il décrit trois voix possibles pour sortir de cette impasse : l’abandon, l’adaptation au système ou l’art de la résistance. On se doute que seul le dernier lui semble susceptible d’envisager un monde qui soit encore habitable, une manière opportune d’équilibrer une posture dont le radicalisme pourrait rebuter. EC

Sans capacité de dialogue avec ses environnements sociaux, une discipline meurt de désuétude, d’inutilité sociale : voilà ce que nous dit le célèbre historien et théoricien de l’architecture Manfredo Tafuri, pour qui « lorsqu’une discipline perd sa fonction sociale, il est utopique et rétrograde d’espérer arrêter le cours des choses ». Chaque jour, l’actualité nous force à assumer une obsolescence déjà bien engagée de notre discipline architecturale, tant toutes les problématiques inédites et délirantes dans lesquelles nous sommes plongés ne peuvent que la déborder de toute part. Par exemple, que peut-on encore attendre aujourd’hui de l’architecture comme art de la composition spatiale, à l’heure du capitalisme émotionnel et dans un monde où « la technologie se propose d’être l’architecte de nos intimités » ? Ou encore, quels rôles et responsabilités confier aux architectes et aux urbanistes, si c’est aux informaticiens et aux commerciaux de la smart city et du smart landscape4 qu’on demande de penser et de remodeler nos territoires. « Pourquoi bâtir encore ?5 » Et puis, de la belle architecture : oui, mais à quel coût éthique, écologique et social ?
Ainsi l’architecture serait inadaptée à ce monde ; il faudrait donc changer l’architecture ? Entrer dans cette interrogation nous place face à (au moins) trois possibilités, trois « scénarios » pour l’architecture : figer l’architecture au risque de la perdre pour de bon, la transformer pour qu’elle soit mieux accordée avec le monde actuel, ou encore la métamorphoser pour qu’elle devienne un outil au service du monde de demain – c’est-à-dire un opérateur de la résistance, un instrument contre-culturel, un catalyseur révolutionnaire.
L’architecture étant culturellement construite, il ne tient qu’à « nous » de considérer que dans l’un, l’autre ou le troisième scénario évoqué se trouvent les valeurs – éthiques, esthétiques, politiques – à suivre pour faire de la « bonne » architecture.

Premier scénario : l’abandon

Dans un premier cas de figure, on pourrait imaginer (...) 

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