Mais à quel usage ce bâtiment est-il destiné ? - D'A n°206

Mais à quel usage ce bâtiment est-il destiné ?
  1. Après l'immeuble-qui-pousse, l'immeuble qui repousse ?
  2. Après les démolitions/reconstruction, une innovation urbaine : la première fourrière à bâtiments
  3. Les effets d’un glissement de terrain dans une périphérie de Caracas
  4. 21 ans de travaux, 4 maires différents, trois programmes : une opération c'est d'abord une histoire humaine.

Ensemble de 114 logements et 4 commerces, Ilôt 1&3 des Mordacs à Champigny-sur-Marne, Edouard François architecte, Paris Habitat OPH maitrise d’ouvrage.

«La banlieue», comme on s’obstine à appeler au XXIe siècle la partie la plus vaste et la plus peuplée de la métropole parisienne, est une «terre de contraste». Et la proie des clichés en tout genre. On y habite soit dans des «grands ensembles» (pour les plus démunis), des «petits tous seuls» (les pavillons de ceux qui ont fuit les premiers) ou des immeubles dits «haussmanniens», placage en pierre de taille et petits chiens assis en toitures, exhalant un je ne sais quoi de bonne respectabilité bourgeoise de la capitale. Un jour, on a demandé à Edouard François, maison d’architecture®, de construire dans ce contexte peu amène. Invité, au coeur d’une cité HLM à Champigny-sur-Marne, à mettre de l’ordre dans ce bordel, l’auteur de l’immeuble-qui-pousse a endossé le rôle de celui-qui-a-dit-non. « On m'a demandé d'amener la beauté, et j'ai refusé. Vouloir la créer à cet endroit-là ne pouvait que rendre les choses encore plus chaotiques et incohérentes. La beauté aurait été idiote, égoïste, abandonnée, comme tombée par hasard en plein carrefour (1)» déclarait le poète architecte à Téléfatras, l’hebdo des situations confuses. Remballant aussi sec son sac à beautés, il a choisit d’appliquer en échange quelques couches de complexité convulsive. Foin des murs-qui-moussent et autres toitures-qui-glouglouttent. On abandonne Nicolas-le-jardinier et son carré Vilmorin pour les armoires réfrigérées du rayon boucherie-charcuterie de la grande surface du coin. Donnez-moi, mon bon monsieur, une tranche de pseudo-haussmannien, deux tranches de HLM à bords marbrés façon maison de Josephine Baker par Adolf Paluloos (Prime à l'amélioration des logements à usage locatif et occupation sociale). Il vous reste des pavillons? Bon, ben je vais vous en prendre trois... Mais que faire maintenant de toute cette bonne viande ? «Je me suis dit que la bonne intervention serait peut-être de superposer ces trois modèles, sans état d'âme (2)», déclare l’architecte sans état d’âme. Les Campiniens, qui n’en demandaient sans doute pas tant, se retrouvent ainsi dotés de cette tranche napolitaine en béton. L’objet est inédit, même si les esprits chagrins, et il y en a, clameront qu’une fois encore, on n’est pas allé assez loin. Manque à ce mille-feuille les centres commerciaux, les stations d’épurations, les salles de sports, les commissariats... Encore un effort camarade Edouard, il reste plein de choses qui ne demandent qu’à être empilées !

(1) Cf. Edouard François à Xavier de Jarcy, in «Crise du logement : à Champigny-sur-Marne, la crème des HLM», Télérama, n° 3227, 18 novembre 2011.
(2) Ibid.

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