Mais à quel usage ce bâtiment est-il destiné ? - D'A n°230

Mais à quel usage ce bâtiment est-il destiné ?

Dévoilé : le prochain pavillon de la Galerie Serpentine, Champs-Braer architectes
Dégonflé : le toboggan gonflable du parc d’attraction bagdadi « Loisirhstan », fermé à la suite de l’avancée des forces djihadistes de l’État islamique.
Décapoté : la toiture rétractable du stand Malabar à la Foire du Trône.

Le pavillon de l’exposition Wave, présentée du 10 septembre au 15 octobre au parc de la Villette à Paris. Sylvain Dubuisson/l’Art en Scènes architectes-scénographes, BNP-Paribas maître d’ouvrage.

Comment mesurer le temps qui passe, et avec lui, les innovations et les progrès réalisés dans l’art architectural ? Le plus simplement du monde, par une visite du pavillon de l’Art mou pour le XXIe siècle (ou PARMOPO_21), flasque soucoupe qu’un hasard heureux à fait atterrir au pied de la vénérable Géode, joyaux de l’architecture des années 1980 ornant comme un diadème le parc de la Villette. Toujours rutilant, le capotage de métal de la boule-cinéma accuse pourtant les années, lorsqu’on le compare au ciel de chewing-gum mâché protégeant les visiteurs de cet édicule éphémère.
La Géode est un bouclier d’inox conçu pour résister à une attaque de météorites de force 3 sur l’échelle de Halley (maintenant SP25 selon la norme européenne), le PARMOPO_21 amortit et renvoie les mauvais coups à l’expéditeur grâce à sa souplesse naturelle, aïkido architectural remisant au grenier ces vieilles lunes réglementaires. La Géode, en dépit de sa forme sphérique, ne roulera jamais vers le périphérique et les grands espaces de la banlieue. Le pavillon de l’Art mou, mobile, nomade et aventurier, pourra bientôt être remonté dans une autre ville. La Géode reflète son environnement, tandis qu’au PARMOPO_21, c’est le visiteur qui vient réfléchir sur l’environnement.
La nuance est de taille. Sous son toit caoutchouteux s’exposent les fameuses bonnes pratiques. « Les bonnes pratiques en matière d’accouplement et de prévention des maladies sexuellement transmissibles », persiflent les mauvaises langues comparant sa couverture à un préservatif avant déroulage, répandant à son sujet d’épouvantables rumeurs qu’il faut démentir vigoureusement. Non, le PARMOPO_21 n’est pas le kiosque qui trônait sur la place du marché de Condom, célèbre commune du Gers, ni l’ancien stand Durex de l’édition 2013 du Salon international de la pharmacie et de la santé !
Le maître d’ouvrage, la BNP, banque d’un monde qui change (mal), a voulu honorer l’âge mou d’une création originale bien qu’elle ait été récemment frappée d’une amende de plusieurs milliards d’euros. Ses soucis financiers l’auraient contraint au réemploi d’une structure existante. Nul ne lui en aurait tenu rigueur. Sa volonté d’honorer demain par ce pavillon Serpentine du pauvre, fils d’un contexte financier plus que hasardeux, la place incontestablement dans le peloton de tête des maîtres d’ouvrage d’aujourd’hui, aussi altruistes que visionnaires.