Mais à quel usage ce bâtiment est-il destiné ? - D'A n°252

Mais à quel usage ce bâtiment est-il destiné ?

11 mars 2011, Sendai, Japon : la force destructrice du tsunami a projeté un cargo sur ce bâtiment de bureaux.
Encore un drame du réchauffement climatique : les normes ne sont plus adaptées et beaucoup de matériaux fondent lorsque la température monte.
Le très frais nouveau musée du Tic Tac, Alba, Italie.

Réponse : Palais des congrès d'Antibes, Jean-Jacques Ory architecte, 2013.

« L’architecte est avant tout un artiste… faire du beau, c’est ce qu’il faut faire ! » Il fallait y penser ! Pour faire du beau, le plus simple est de le vouloir, c’est en tout cas ce qu’a déclaré l’architecte et pape du façadisme, Jean-Jacques Ory, après avoir conçu ce Palais des congrès en plein coeur d’Antibes. Il n’est pas sûr que cette fière résolution ait suffi à faire de cette opération menée en PPP un modèle d’intégration architecturale. Le dossier de presse du Palais des congrès nous apprend par ailleurs que, pour l’architecte, « l’acte de bâtir rentre dans un processus intellectuel qui consiste avant tout à respecter l’humain et à imaginer les meilleures solutions pour lui ». Encore une idée géniale qui a sans doute échappé à tous ses autres confrères et qui explique sans doute pourquoi ils n’ont pas, comme lui, été appelés par les plus prestigieux clients : Le Crédit Lyonnais (pour reconstruire son siège, détruit par un incendie en 1992), et aussi, comme s’en émerveille le journaliste Gérald Asaria sur le site proprietes.lefigaro.fr, « les sièges de Louis Vuitton au pont Neuf, de LVMH avenue Montaigne, de L’Oréal, de la Swiss Life, de l’UBS (…). Au total, son bureau a restructuré ou créé 2 millions de mètres carrés à Paris et en banlieue. Un record, auquel on peut ajouter des boutiques dans le Triangle d’or comme celles de Céline, ou de Nike sur les Champs-Élysées. » Dans cette ville où se croise la jet-set internationale, l’improbable assemblage du nouveau Palais des congrès laisse perplexe. Doit-on y voir un clin d’oeil au débat sur l’agrandissement du port qui divise la ville ? Après avoir rallongé et creusé les quais il y a une vingtaine d’années pour accueillir les yachts d’Adnan Khashoggi et du prince Al-Walid, la rade n’est plus assez grande pour amarrer L’Éclipse, celui deux fois plus long (162,5 m) du milliardaire russe Roman Abramovitch. Faut-il une nouvelle fois défigurer le port pour récupérer la manne de ces Crésus flottants ? Leurs monstres des mers ont au moins une qualité, ils peuvent en quelques heures disparaître du paysage antibois.

Emmanuel Caille