Très originale, la structure urbaine du territoire est très difficile à définir : à elle seule, elle aurait mérité d’être classée à l’Unesco ! Est-ce une treille, un archipel, un système en réseau ? Ce sont là des images métaphoriques, qui renvoient à des conceptions spatiales. Or, la question spatiale est bien loin d’épuiser le sujet du bassin minier, comme le savent les élus concernés. Ils ont constitué l’association Euralens dès 2008 pour porter ensemble la stratégie de renouveau culturel, éducatif, social, économique du territoire, aujourd’hui rassemblé dans le pôle métropolitain de l’Artois (PMA). Toutefois, ces questions spatiales et patrimoniales ne sont pas subalternes, car il est primordial de comprendre comment a été constitué le territoire pour définir à quelles conditions il peut être support d’identité et devenir support de développement.
Les deux moteurs de la transformation du territoire identifiés au démarrage sont l’implantation du Louvre-Lens et l’inscription du bassin minier par l’Unesco. Ils poussent au désenclavement, à l’ouverture sur l’extérieur, à l’excellence, apportent une reconnaissance internationale et incitent à oser.
Pour accueillir le Louvre dignement à Lens, lui donner un cadre agréable et valoriser les cités qui l’entourent, la communauté d’agglomération Lens Liévin (CALL) lance en 2010 un dialogue compétitif international, dont Michel Desvigne et Christian de Portzamparc sont lauréats. Le fait que le mandataire de la maîtrise d’œuvre urbaine soit un paysagiste est important. D’emblée, les élus sont conquis par l’idée du plan directeur proposé pour la centralité d’Euralens (Lens, Liévin et Loos-en-Gohelle), dont les principes seront ensuite étendus à la grande échelle du bassin minier du Pas-de-Calais avec la chaîne des parcs : « Vous étiez l’archipel noir, vous êtes maintenant l’archipel vert. » Révélé, renforcé, cet archipel vert va devenir support de changement d’image, d’urbanisation et de développement.
Les espaces vides laissés par la mine et les cavaliers peuvent servir de lien à tous ces lieux et équipements épars, allant de la gare de Lens jusqu’au campus sportif de Liévin en passant par le Louvre et son nouveau centre de conservation, et le stade Bollaert, avec une ramification très forte vers les terrils de Loos-en-Gohelle qui marquent le paysage.
Continuité et fragmentation
À Lens, environ 40 % du tissu urbain est composé de cités minières. Ces cités sont toutes tournées sur elles-mêmes. Le premier constat fait avec Portzamparc et Desvigne est que ces cités, d’une qualité de dessin extraordinaire, sont introverties et juxtaposées : tout a été créé autour du puits de mine. Dans le périmètre d’Euralens, il n’y a pas de ville constituée, sauf les quelques villes historiques de Valenciennes, de Béthune ou de Douai. Il n’y a pas de liant entre les cités, les communes dans ce territoire de 650 000 habitants, à la fois continu au-dessus du filon minier et fragmenté. Le coup de génie de la proposition de Michel Desvigne, c’est de dire : « On ne va pas combler tous ces vides : ce qui est laissé par la mine peut servir de lien, et devenir vert. » Ces espaces ont déjà été partiellement récupérés par la nature : il faut prolonger la dynamique, pour créer une sorte d’archipel chevelu vert, qui va constituer l’armature de cet ensemble spatial d’échelle considérable. En élaborant le plan directeur d’Euralens centralité, on a constaté que (...)