À partir du début des années 1990, sous l’impulsion des nouvelles technologies, la mondialisation s’est initialement traduite par une virtualisation des espaces sociaux, une dématérialisation des échanges et des réseaux, une déterritorialisation des activités économiques. Frances Cairncross, la spécialiste médias du fameux newsmagazine libéral The Economist, a pu parler au terme des années 1990, dans un livre qui a connu un grand succès, de la mort des distances et de « la fin des lieux » comme du facteur décisif du capitalisme mondial1. Au-delà de la désindustrialisation des pays de l’OCDE, la délocalisation signifierait alors la réalité même de la mondialisation dans ce qu’elle a de plus essentiel : non pas seulement un changement de lieu, mais l’impossibilité même d’avoir un lieu.
Cette dématérialisation, favorisée par les nouvelles technologies de l’information et de la communication, était alors porteuse des plus grandes promesses en matière d’écologie : les nouvelles technologies devaient conduire la production économique à ce qu’on appelle le « découplage », c’est-à -dire à un système productif dont la croissance s’accompagne d’une diminution de l’impact environnemental et de la consommation d’énergie. De toutes les promesses déçues des années 1990, celle-ci fut sans doute la plus mensongère. (...)