![]() Citizen, 1996. Epreuve à la gélatine d'argent, 181 x 234 cm. |
À l'heure du Grand Paris et des interrogations sur la grande échelle, la question de l'intimité territoriale et de l'espace public est devenue cruciale. Le critère de performance favorisé par l'industrie du bâtiment privilégie l'exercice amnésique du métier d'architecte ou d'urbaniste. Pour rouvrir le débat sur les conditions sociopolitiques du projet, Jean-François Chevrier se tourne vers l'art en montrant comment des photographes contemporains retrouvent une voie ouverte par l'anthropologie. Il propose de réactiver une pensée sensible et critique du territoire, en tension avec l'idée normative d'espace public. |
L'intimité est généralement située du côté de l'expérience privée ou privative ; on entend par là un sentiment de proximité à soi-même et à d'autres personnes, dites justement « proches », qui peut prendre diverses tonalités affectives, de l'euphorie à la fatigue. Ce sentiment de proximité est inclusif, mais on en limite généralement l'aire d'expérience aux parages du corps propre (le corps à la première personne) et à l'espace domestique ou communautaire.
Le mot « intimité » sert aussi à désigner une qualité d'espace trouvée ou aménagée dans des lieux spécifiques. Est qualifiée d'« intime » une situation ou une ambiance favorable au relâchement de l'attention défensive. Une photographie de Jeff Wall, Citizen (1996), illustre cette idée : elle représente un homme endormi sur la pelouse d'un parc public ; l'homme ne craint rien, il est confiant, il se sent suffisamment protégé. L'intimité participe des droits et devoirs de la citoyenneté ; elle doit être elle-même protégée, garantie.
Cette conception minimale et nécessaire
de l'intime appelle une imagination poétique et politique du
territoire qui s'oppose au séparatisme sécuritaire. Si l'on
sait que le parc de Citizen est situé à Los Angeles, on mesure
combien la confiance adressée par le personnage à ses concitoyens
contredit la dramatisation de l'insécurité qui accompagne
généralement la mythologie du chaos métropolitain. C'est cette
mythologie que Mike Davis a dénoncée à propos de Los Angeles, dans City of Quartz*. (...)
* Mike Davis, City of Quartz. Los Angeles capitale du futur (Londres, 1990), Paris, La Découverte, 1997.
Lisez la suite de cet article dans :
N° 219 - Juillet 2013
![]() |
Il était temps qu’une exposition rende hommage à Paulo Mendes da Rocha (1928-2021), l’un des … [...] |
![]() |
Face à la catastrophe climatique dont l’opinion publique a largement pris la mesure avec la ter… [...] |
![]() |
La Biennale internationale d’architecture de Venise, qui a ouvert ses portes en mai dernier, sembl… [...] |
![]() |
La professeure et chercheure, Monique Eleb est décédée en mai 2023. En plus des nombreux ouvrag… [...] |
![]() |
Le sud du 11e arrondissement était autrefois occupé par de nombreuses usines de meubles. C’est… [...] |
![]() |
Pulse est une installation sonore de Susanna Fritscher présentée jusqu’au 4 juin au Forum de l… [...] |
Réagissez à l’article en remplissant le champ ci-dessous :
Vous n'êtes pas identifié. | |||
![]() |
SE CONNECTER | ![]() |
S'INSCRIRE |
> Questions pro |
![]() |
Quelle importance accorder au programme ? [suite]
C’est avec deux architectes aux pratiques forts différentes, Laurent Beaudouin et Marie-José Barthélémy, que nous poursuivons notre enquête sur… |
![]() |
Quelle importance accorder au programme ?
Avant tout projet, la programmation architecturale décrit son contenu afin que maître d’ouvrage et maître d’œuvre en cernent le sens et les en… |
![]() |
L’architecture au prisme des contraintes environnementales : le regard singulier de Gilles Perraud…
Si les questions environnementales sont de plus en plus prégnantes, les labels et les normes propres à l’univers de la construction garantissent… |
![]() |